tu ne sais rien de l’amour

L’histoire

Nicolas connait Malina depuis toujours. Elle est belle et ses amis la lui envient. Quant à sa mère, elle ne cesse de répéter qu’ils forment un joli couple et qu’un jour, ils se marieront.
Sauf que Nicolas se pose des questions : amour rime-t-il vraiment avec toujours ? Peut-on aimer plusieurs personnes en même temps ? Comment ne pas confondre amour et désir ? Est-ce qu’on aime qu’une fois au cours d’une vie ?… Il se demande surtout si l’obstination de sa mère ne cacherait pas quelque secret ? Du genre qu’il vaudrait mieux ne jamais déterrer…

Le mot de l’auteur

A travers une interview de M. Ollivier par Bénédicte Villain (juin 2016)

– Quels sont les livres qui ont forgé votre vision de l’amour à l’adolescence ?
Je lisais peu, j’étais plus sensible aux films. Pourtant, je les voyais rarement dans leur intégralité. Mon père zappait dès qu’une scène risquait de devenir sensuelle, et surtout, comme j’avais école le lendemain, je devais monter me coucher au bout d’une heure ! C’était à la fois frustrant et excitant, une sorte de coitus interruptus cinématographique qui a contribué à développer mon imagination. J’ai donc acquis à l’époque une vision des rapports amoureux parfaitement fantasmée. Je me souviens notamment que Claude Sautet, dans ses films, faisait mener à Michel Picoli ou Romy Schneider des vies qui m’apparaissaient incompréhensibles mais très enviables !

– Qu’auriez-vous, à l’époque, aimé lire ou voir à ce sujet ?
J’aurais eu besoin que l’on m’explique que j’aimerais plusieurs fois au cours de ma vie, qu’amour et désir se confondent souvent, que l’on peut aimer deux personnes en même temps… Qu’un jour, je ferai souffrir celle que j’aime. Que ce qui me séduit aujourd’hui me tapera peut-être sur les nerfs dans cinq ans ! Qu’on a le droit de dire « je ne t’aime plus ». Ça m’aurait évité pas mal d’erreurs et de douleur !
J’aurais aimé que l’on démystifie l’amour, pour me le rendre plus vivable.

– Vous ouvrez le roman par un cauchemar, est-ce pour créer d’embler de la tension ?
Non-dit et inconscient sont très présents dans ce roman, et ce cauchemar de mon héros en est l’expression. Il était donc naturel d’ouvrir le livre par ces images qui ne prennent leur signification qu’à la fin de l’histoire. Si en plus cela créé de la tension, tant mieux ! Tu ne sais rien de l’amour n’est pas un polar, mais il est plein de révélations, de découvertes, et d’un fort suspense que je qualifierais de psychologique. Comme la vie.

– A propos de suspense, celui du roman est tissé des secrets des différents personnages. Vous semblez apprécier les secrets…
Enfant, j’avais la sensation qu’on me cachait l’essentiel, que la vie était plus complexe (et passionnante) qu’on voulait bien me le dire. Je peux affirmer aujourd’hui que j’avais sacrément raison ! En fait, la dissimulation est une des composantes principales de l’éducation, et donc le secret, surtout pour quelqu’un qui, comme moi, a été élevé avant que le divorce et la recomposition des familles soient la norme, avant que les enfants deviennent les témoins du tumulte de la vie amoureuse de leurs parents.

– Votre roman parle d’amour, d’infidélité, de mort… Peut-on tout dire en littérature de jeunesse ?
D’après Cioran, « On ne devrait écrire des livres que pour y dire des choses qu’on n’oserait confier à personne. » J’essaye d’écrire ce qu’il m’est difficile de dire, ce que mes parents n’ont jamais osé me confier. Et de toute façon, je n’ai jamais écrit pour la jeunesse, mais sur la jeunesse. Je n’aborde pas de sujets réservés aux jeunes lecteurs, j’adopte le regard d’un personnage jeune sur des sujets qui concernent tout le monde.

Mikaël Ollivier


La presse en parle


extrait

Le cliquetis. Régulier, de plus en plus fort. Il approche. Fuir est inutile. La peur me paralyse. Ce bruit de griffes sur le carrelage me tétanise. Je voudrais disparaître. Qu’il disparaisse. Je ferme les yeux. Déjà je perçois son halètement. Je sens la chaleur de son corps. De son souffle. Il est sur moi. Je voudrais crier, mais aucun son ne sort de ma bouche grande ouverte. Je me réveille d’un coup, une aspiration brutale qui m’arrache au sommeil. Je suis assis dans mon lit. Mes yeux s’habituent à l’obscurité du studio. J’entends la ville, dehors, qui bruisse encore, qui jamais ne s’arrête tout à fait. Un ressac urbain qui me rassure. Je n’avais plus fait le rêve du chien noir depuis neuf ans.
Pourquoi cette nuit ? Pourquoi ce retour soudain d’un songe qui m’a terrifié une partie de mon enfance ?
Je n’ai pas peur aujourd’hui. Mon cœur ne cogne pas dans ma poitrine comme avant, quand je me retrouvais essoufflé et glacé de sueur au milieu de la nuit. Je suis simplement étonné.
Pourquoi le chien est-il revenu me voir en rêve ?
Je me lève, je vais boire un verre d’eau à l’évier. Je regarde Strasbourg depuis mon septième étage.
Je n’ai pas éteint mon ordinateur portable en me couchant. Je réanime l’écran d’une pichenette sur la souris. Un petit 1 rouge indique que j’ai reçu un message. Je jette un œil.
Maman.
C’est ma mère qui m’a écrit, elle qui n’aime pas ça, préférant de loin le téléphone.
Le message a pour titre : Ce qu’il vous faut savoir.
« Vous ? » Ma mère et moi ne nous vouvoyons pourtant pas !
Je m’assieds par terre devant la table basse et ouvre le message.
Pas un mot, mais une pièce jointe.
Décidément, cela ne ressemble pas aux façons de faire de ma mère. Cette lettre a des allures solennelles, presque officielles, qui m’intriguent.
Je clique sur l’entête du message et constate qu’il y a un autre destinataire en copie. Ou plutôt une autre.
Malina.
Je reste immobile un long moment. Cette fois, mon cœur s’est mis à cogner. La méfiance s’empare aussitôt de moi, plus instinctive que réfléchie.
Ce qu’il vous faut savoir ? Ce qu’il nous faut savoir, Malina et moi ?
Je me surprends à penser : « Quoi encore ? »
Qu’est-ce qu’il y a encore que je ne sais pas ? Je pensais avoir fait le tour des révélations depuis longtemps ! Depuis neuf ans. Et quoi, qui concerne Malina et moi ?
J’hésite à ouvrir la lettre, maintenant. Demain, je suis de garde, j’ai besoin de mon comptant d’heures de sommeil… Et puis, je repense au rêve du chien noir : c’est comme s’il était venu m’avertir que j’avais reçu un message ! Un message du passé sur lequel il me faut, une fois encore, me pencher.
Reproduit avec l’aimable autorisation des éditions Thierry Magnier © Editions Thierry Magnier – toute reproduction interdite

Éditions Thierry Magnier

Parution : 24 août 2016 (rééd. 2018)
8,00 euros – 240 pages
Niveau de lecture : à partir de 13 ans
ISBN : 979-1035201-951